Les évènements actuellement en cours en Guinée-Conakry interpellent
notre conscience africaine et exigent de nos organisations
communautaires plus de lucidité et de capacité de discernement.
Il est trop facile d'applaudir par pur sentimentalisme
africain le capitaine Moussa Dadis Camara et ses hommes ou de les
condamner « par principe » en suivant aveuglément la nébuleuse «
communauté internationale» à l'agenda et aux intérêts diffus.
Il est plus difficile de regarder froidement la réalité en face, de l'analyser et d'en tirer les leçons.
S'il urge de sauver enfin la Guinée après la mort du président Lansana
Conté, il est tout aussi impératif que dès à présent les évènements de
Conakry, au delà de la Guinée, servent à repenser l'Afrique, ses
institutions et son leadership.
Pour ce faire, permettons-nous une petite digression dans
l'histoire récente de la Guinée, vue à travers le prisme des
institutions africaines et notamment de l'Union africaine (U.A)
anciennement Organisation de l'Unité Africaine (OUA).
Il y a un peu plus de 24 ans, en mars 1984 précisément,
disparaissait Ahmed Sékou Touré, héros et père de l'indépendance du
pays dont le parcours et les dernières années de règne sans partage
rappellent tragiquement ceux du président Zimbabwéen Robert Mugabe
(tous deux acculés par l'occident et victimes de leur nationalisme
radical ainsi que de leurs positions résolument anticolonialistes).
Le président Sékou Touré parti, il fut offert au peuple
guinéen une occasion historique de se définir une nouvelle trajectoire
et de se donner une nouvelle destinée. Son élite exilée, son peuple
encore timoré et sous le choc, la Guinée et les Guinéens de l'époque
furent incapables de saisir cette opportunité.
Des militaires avec à leur tête le colonel Lansana Conté
sautent quant à eux sur l'occasion et s'emparent du pouvoir en avril de
la même année. Le président Conté y restera jusqu'à son dernier souffle
et finira un peu comme son prédécesseur, dont il avait promis de
rectifier les erreurs par le truchement du Comité Militaire de
Redressement National qu'il avait mis en place dès sa prise du pouvoir.
Par Hamadou Tidiane SY