• L’ignorance des taxi-moto, frein à la lutte contre la pollution de l’air

    « C’est la première fois que j’entends parler d’une chose pareil. Je ne savais pas que la fumée des motos contient des éléments qui peuvent mettre en danger la santé des conducteurs et des usagers de la route. Même au sein de nos syndicats nous n’avons pas des informations du genre. Il y a d’autres sensibilisations qui se font mais pas sur la pollution de l’air liée à notre activité », confie surpris Jean Apetti, conducteur de taxi-moto, habitant de Lomé, la capitale togolaise. 

     

    Problèmes environnementaux au Bénin, Niger et Togo

     

    L’ignorance des taxi-moto, frein à la lutte contre la pollution de l’air

     

    « C’est la première fois que j’entends parler d’une chose pareil. Je ne savais pas que la fumée des motos contient des éléments qui peuvent mettre en danger la santé des conducteurs et des usagers de la route. Même au sein de nos syndicats nous n’avons pas des informations du genre. Il y a d’autres sensibilisations qui se font mais pas sur la pollution de l’air liée à notre activité », confie surpris Jean Apetti, conducteur de taxi-moto, habitant de Lomé, la capitale togolaise. 

    La trentaine, ce père de famille n’a pas caché son inquiétude de savoir qu’il est exposé à un tel risque engendré par son activité de chaque jour et pouvant aller jusqu’à des maladies pneumo-cardiaques. 

    Jean Apetti n’est pas le seul conducteur de taxis-motos à ignorer les conséquences des fumées noirâtres et gaz d’échappement toxiques sur la santé des conducteurs et sur celle des populations.

    Ils sont nombreux les conducteurs de taxi-moto  encore appelés « zémidjan » («emmène-moi vite» en langue fon, parlée majoritairement au sud du Bénin) à ne pas le savoir. 

    C’est le cas de Paul Vigan. Ce conducteur de taxi-moto depuis quinze ans à Cotonou (capitale économique du Bénin), traine depuis deux semaines une toux qui ne finit pas et qui  l’empêche de travailler convenablement.

    «Je prends des comprimés, des médicaments mais la toux refuse de partir. Je n’arrive plus à bien travailler. Dès que je rentre dans la circulation et respire un peu la fumée, elle m’étouffe presque et je suis obligé d’arrêter», dit-il en toussant à se faire arracher la gorge.

     Monoxyde de carbone dans les veines

     L’activité de conducteur de taxi-motos qu’exercent Vigan et Apetti a démarré pendant la crise économique des années 80.

     Au fil des années, elle a pris de l’ampleur avec la montée du chômage dans les différents pays (Bénin, Niger et Togo).

    Aujourd’hui, des centaines de milliers de chômeurs et de sans diplômes venus de la campagne s’adonnent à cette activité dans ces pays au mépris des règles de conduite élémentaires et des répercutions sur la santé et l’environnement. En dehors de quelques-uns parmi les conducteurs, la grande majorité n’a pas de permis de conduire et certains occasionnent régulièrement des accidents de circulation et y laissent parfois leur peau.

    Les taxi-motos, bons marchés et grands consommateurs de l’essence de mauvaise qualité vendue aux abords des voies, constituent une grande source de pollution dans les grandes villes comme Cotonou, Lomé et Niamey et dans les agglomérations secondaires.

    Exposés à la fumée et aux gaz d’échappement à longueur de journée, les conducteurs de taxi-motos souffrent le plus souvent des affections aigües allant des maladies cardio-vasculaires et respiratoires aux cancers (cancer de gorge et  de poumon). 

    De nombreuses études réalisées un peu partout en Afrique de l’Ouest notamment dans ces trois pays où ce mode de transport est généralisé, indiquent des taux élevés de polluants dans le sang des conducteurs.

    Selon Marius Kèdoté, spécialiste de santé publique et chercheur à l’Université d’Abomey-Calavi (Bénin), l’exposition même à des niveaux faibles de particules pendant une longue période a des effets néfastes sur la santé. 

    Au Bénin, les études menées par le professeur Benjamin Fayomi, toxicologue et enseignant chercheur à la Faculté des sciences de la santé de Cotonou, indiquent sans ambages un niveau élevé de monoxyde de carbone dans le sang des conducteurs de taxi-moto dépassant la normale, de même qu’un taux de benzène dans l’air à Cotonou 20 fois supérieure à la normale.

     Au Centre National hospitalier universitaire Hubert Maga de Cotonou et Sylvanus Olympio de Lomé, les médecins confirment avoir diagnostiqués des maladies respiratoires à de nombreux patients conducteurs de taxi ou de taxi-moto. 

    Robert Yèhouénou, président du Mouvement des Zémidjan pour un Bénin Emergent (Mo.ze.be), au cours d’un atelier de la Chaire écosanté en juillet 2015 à Cotonou, a confié que beaucoup de ces syndiqués souffrent de nombreuses maladies respiratoires et cancers. Il ajoute que beaucoup n’ont pas pu trouver guérison et sont morts de ces maladies.

    Tout en estimant, au regard des nombreux cas de décès enregistrés au sein de sa corporation du fait de la pollution de l’air, Yèhouénou regrette que rien n’est fait, de façon concrète, pour maîtriser ce phénomène qui, d’ici à quelques années, risque d’emporter tous les conducteurs de taxi-moto dans la tombe.

    Selon l’Organisation mondiale de la santé (Oms), la pollution de l’air ambiant tue chaque année  environ 3,7 millions de personnes à travers le monde.

    On compte certainement de nombreux conducteurs de taxi-moto dans le lot des personnes qui meurent annuellement à cause de la pollution de l’air dans le monde.

    Manque d’information

    La déclaration surprise de Jean Apetti traduit bien le manque d’information sur la pollution de l’air chez beaucoup de conducteurs de taxi-moto et leur ignorance des répercussions de leur exposition à des particules toxiques produits par leur propre outil de travail. Il traduit également la quasi absence de communication entre les acteurs institutionnels (gouvernements, Ong, collectivités locales) et les conducteurs de taxis-motos en matière protection de l’environnement. 

    Certes, des efforts sont faits dans les différents pays pour réduire l’impact des taxi-moto, en forte augmentation dans les villes, sur les écosystèmes. Des campagnes de sensibilisation sporadiques sont organisées de diverses manières et par le biais de différents canaux (radio, télévision, distribution de dépliants), par les acteurs institutionnels des pays (ministères de l’environnement surtout) pour réduire les dommages écologiques et sanitaires de la pollution de l’air. 

    Mais ces actions, ajoutées aux campagnes de contrôle-réglage anti-pollution dans les villes par moment, sont insuffisantes et ne touchent pas grand monde. Le gros lot des conducteurs de taxi-moto qui pour la plupart sont analphabètes et ne comprennent pas le bien-fondé de ces opérations parfois musclées. 

    En général, les gouvernants prennent aussi des mesures politiques allant dans le sens de la reconversion des conducteurs dans d’autres secteurs d’activités. C’est le cas au Bénin où le gouvernement d’alors avaient initié un projet de reconversion des conducteurs dans la  filière manioc qui na rien donné. 

    Selon Marcos Wabi, de la Direction de l’environnement (Bénin), les autorités actuelles du pays ont pris des mesures pour promouvoir les motos nouvelles générations (moto quatre temps contre deux temps) en réduisant les frais de dédouanement.

    Mais toutes ces initiatives politiques nobles et appréciées par les uns et par les autres ne permettent pas pour autant à réduire le poids des pollueurs dans la dégradation de l’environnement. Bien au contraire !

    Le moins que l’on puisse dire est que les interactions entre les conducteurs et les structures qui évaluent la qualité de l’air sont loin de porter leurs fruits. La pollution des taxi-moto continue ça et là, drue avec les nouvelles arrivées ou recrues dans le secteur des transports terrestres. Le chômage crescendo toujours aidant.

    Les conducteurs eux-mêmes qui ne sont pas tous conscients des dangers à une exposition à des polluants, persistent toujours dans les mêmes habitudes en continuant toujours par utiliser du carburant de mauvaise qualité, certes moins cher que celui vendu à la pompe, mais dangereux pour la vie.

    Comme le souligne Monique Ouassa Kouaro, socio-anthropologue à l’Université d’Abomey-Calavi, dans une étude, «(…) il faut être d’abord informé pour apprécier les enjeux environnementaux ».

    C’est donc nécessaire et impératif de redoubler d’efforts par la coopération multisectorielle pour mieux informer, sensibiliser et éduquer les pollueurs en vue de prévenir l’impact de la pollution de l’air sur l’environnement et  la santé.

    Christophe D. Assogba

     

    Article réalisé avec le soutien de CSE Media Fellowships Programme à New Dehli (Inde)

     

     

     


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